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18 mai 2014 7 18 /05 /mai /2014 20:07

Thaumiers-vendangeurs

 

Souvent représentées sur les enluminures et calendriers médiévaux, les scènes de vendanges ont aussi inspiré les sculpteurs romans. Au sud de Dun-sur-Auron, dans le Cher, sur l'abside de l'église de Thaumiers, est visible sur un chapiteau un résumé de cette pratique essentielle à l'économie rurale, mais aussi à la liturgie.
Le sens de lecture est identique à celui de l'écriture.

 

Thaumiers-vendange

 

A gauche, un personnage cueille le raisin recueilli dans un panier. Malgré la faiblesse des performances de l'appareil avec lequel j'ai pris ces clichés, on observe la trame du panier, en osier, saule ou écorce de châtaignier.
Au centre, deux hommes soulèvent un cuveau cerclé, garantissant une moindre perte de jus de raisin pendant le transport vers la cuve à presser. Deux lumières ont été ménagées pour passer une perche qui porte sur l'épaule des ouvriers.

 

Thaumiers-foulage

 

La dernière scène est, en toute logique, le foulage aux pieds de la récolte, dans une cuve cerclée, selon les principes de la tonnellerie.
Cette lecture appelle une ou deux remarques. D'abord, tous les gens qui ont un jour visité un musée de la vigne auront reconnu un outil qui servait encore dans les vignes il y a quelques décennies, le cuveau à porter les grappes, dont le modèle n'a pas du connaître d'évolution significative depuis l'époque romane, et peut-être même bien avant.
On voit aussi que les pressoirs, connus par quelques textes dont la charte de franchise de Vesdun, étaient encore d'une technologie trop complexe, et peut-être aussi trop onéreuse, pour des paroisses sans seigneur clairement identifié comme Thaumiers.

© Olivier Trotignon 201

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11 mai 2014 7 11 /05 /mai /2014 09:29

Vernet-cheminée

 

 

L’affaire n’est pas nouvelle, et plusieurs billets de ce blog ont déjà exposé les détails de cette affaire: la région où j’habite, dans le sud du Cher, est orpheline d’un petit château fin Moyen-âge/début Renaissance, dit manoir ou château du Vernet, déconstruit dans les années 20 dans des circonstances mal éclaircies.
L’absence de recherches de la part de spécialistes de l’entre deux guerres explique qu’on ignore à peu près tout de l’endroit (ou des endroits) où sont partis les éléments d’architecture soustraits à cette bâtisse de la façon la plus légale qui soit. Sitôt vendu, dans l’immédiat après-guerre, le manoir a été pillé de toutes ses belles pierres, peut-être aussi de ses poutres et tuiles, par son nouveau propriétaire. La carcasse mutilée du bâtiment a été ensuite rasée.
Une rumeur persistante l’a donné pour reconstruit en Amérique (le rêve américain, sans doute), où il est introuvable, mais où ses pierres ont peut-être été dispersées. Une autre piste le maintiendrait dans l’hexagone, où il aurait servi à alimenter la mode des maisons de prestige bâties avec des caractères néo-médiévaux très affirmés, ou peut-être à restaurer des propriétés ravagées par le conflit avec l’Allemagne.
Bref, les belles pierres du château du Vernet sont peut-être quelque part anonymes, mais bien visibles et, à en juger du nombre de lecteurs de ces pages, il existe une petite chance pour que l’une ou l’un d’entre vous en ait déjà croisées lors de ses visites ou ses recherches.
Préparant pour la Croix-Rouge une animation sur ce thème, si tout va bien, fin juin (date encore incertaine), j’en appelle à vos souvenirs pour trouver la piste des pierres disparues. Si vous disposez d’informations sur leur réemploi, cela me permettrait d’enrichir l’argumentation de mon exposé et de dissiper une partie du mystère qui entoure ce dossier.
Un partage de cet article avec vos contacts multiplierait les chances de trouver une piste.
Voici les éléments dont nous disposons, à partir de photographies d’archives que je ne peux agrandir plus sous peine de rendre illisibles les détails sculptés.
En ouverture de ce texte, une cheminée dont le manteau était orné d’une pierre blasonnée, peu lisible, et peut-être martelée à la Révolution.

 

Vernet-jambage

 

Un jambage de cheminée avec corbeau sculpté d’un personnage naïf. L’autre jambage est aussi sculpté. Le linteau est absent.

 

Vernet-fenêtre

 

Une jolie fenêtre de style Renaissance, qui semble avoir perdu ses pinacles.
Merci pour votre aide!

© Olivier Trotignon 201

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4 mai 2014 7 04 /05 /mai /2014 21:17

Gisant de Pierre Pèlerin XVe siècle

 

Voici presque deux ans et demi, j'avais le redoutable honneur d'inaugurer la série de conférences "Une heure, une œuvre", initiée par l'ancienne conservatrice du musée de Saint-Amand-Montrond, Marie-Christine Planchart, aujourd'hui en poste au musée d'Issoudun.
La proposition de Marie-Christine s'appuyait sur la promesse de l'édition d'une plaquette réunissant toutes les contributions des conférenciers, sous forme d'articles illustrés destinés à garder une trace de ce cycle de conférence. Sa hiérarchie d'alors s'était engagée à faire imprimer la somme des articles remis par les intervenants. Comme on pouvait hélas s'y attendre, cet engagement s'est dilué au fil des saisons, me libérant du coup de ma propre promesse de garder inédit l'article que j'avais rédigé à cette occasion.
Cet article, je le dédie à Marie-Christine Planchart et à toutes les personnes de bonne volonté qui œuvrent pour l'indépendance d'une Culture de qualité, et je l'offre à tous les lecteurs de Berry médiéval.

Pierre Pèlerin et les mutations de la société saint-amandoise à la fin du Moyen-âge

Les épreuves qui ont marqué le Berry au cours du très long conflit avec les Anglais n'est plus qu'un souvenir. Partout, dans une ville de Saint-amand longtemps repliée sur elle même par crainte d'une invasion et appauvrie par les troubles de la Guerre de cent ans résonnent les bruits des chantiers de construction. Dans son hôtel particulier, Pierre Pèlerin, riche bourgeois anobli, vient de décéder. Sa dépouille est prête à rejoindre le sépulcre qu'il s'est lui-même choisi, dans l'abbatiale des Carmes de la ville, où elle reposera sous une des plus curieuses dalles funéraires de France.

Une œuvre exceptionnelle
La mode des gisants a fait son apparition au cours du XIIe siècle et s'est étendue dans toute la Chrétienté. Des plus modestes églises de campagne aux plus grandes cathédrales apparaissent des statues représentant des membres éminents de la société sur leur lit de mort. Rois, princes, femmes de la noblesse, grands seigneurs et plus modestes chevaliers, évêques, abbés, maîtres de commanderie sont figurés en haut-relief, couchés sur leur lit de mort, avec des détails de leur anatomie ou de leur fonction reproduits avec minutie dans des roches locales, des calcaires ou des marbres d'importation, parfois dans de la tôle de bronze. Comparé à l'immense majorité des modèles régionaux ou européens, le gisant de Pierre Pèlerin présente des singularités étonnantes.
La statue est, en effet, sculptée au fond d'une cuve de pierre. La surface externe du monument, plate, est occupée par l'épitaphe, fortement usée et porte la marque d'une profonde feuillure avec des trous de chevilles, comme si l'effigie du défunt avait été primitivement dissimulée sous un volet ou un couvercle de bois. Contrairement aux autres dalles funéraires régionales -gisants ou plates-tombes- protégées par des enfeus ou placées hors-sol sur des socles, il est possible que celle du saint-amandois est été disposée au ras du sol de l'ancienne abbatiale, ce qui expliquerait les marques d'usure constatées.
Tout aussi singulier est le commanditaire du gisant, un bourgeois saint-amandois, qui a choisi de se faire représenter vêtu de l'habit des pèlerins de Compostelle, les pieds reposant sur un couple de chiens, symbole de son appartenance à la noblesse. Ce détail n'a pas échappé aux iconoclastes révolutionnaires, qui ont mutilé cette partie de l'œuvre ainsi que le visage de l'homme, mais qui on épargné l'écusson du dais. Alors que la plupart des commentaires ne s'attachent qu'à l'aspect superficiel de la tenue vestimentaire de Pierre Pèlerin et décrivent le gisant comme celui d'un pèlerin de saint Jacques, un examen plus approfondi de la dalle funéraire délivre les indices d'une réalité beaucoup plus complexe.

Le triomphe de la bourgeoisie d'affaire
Pèlerin est un homme dont l'histoire personnelle, en l'absence de dépouillement complet des archives de son temps, demeure obscure. Nous savons que ce bourgeois contribua à la construction de la nouvelle abbaye des Carmes de Saint-Amand par don d'une partie de sa fortune, ce qui lui valu en retour le droit de se faire inhumer dans le sanctuaire abbatial, comme c'était l'usage dans les monastères depuis le Haut Moyen-âge, privilège réservé aux abbés et aux protecteurs de leurs communautés. Nous connaissons l'année de sa mort, inscrite sur l'épitaphe, mais rien de plus. Ses origines, ses alliances, sa descendance éventuelle, l'origine de sa fortune et l'emplacement de sa résidence demeurent un mystère, mais son gisant donne au moins une information exacte bien que souvent ignorée: Pierre Pèlerin est un bourgeois anobli. Comme son contemporain le berruyer Jacques Cœur, il s'est certainement servi du produit de sa réussite financière pour s'élever dans l'échelle sociale en achetant des terres anoblissantes. En ce début de Renaissance, le Boischaut abrite une multitude de petites seigneuries dont la possession donne des quartiers de noblesse à leur titulaire. Beaucoup de gens riches, complexés par la modicité de leurs origines, cherchent en ces temps à s'élever au dessus de leur condition alors que la petite et moyenne noblesse, ruinée par les désordres de la Guerre de cent ans, n'arrive plus a entretenir tous ses domaines. Une étude fine des mutations de fiefs à cette époque confirmera peut-être un jour cette hypothèse. Le changement de strate sociale s'affirme aussi, mais moins nettement, par l'écusson gravé sur dais au dessus de la tête du défunt, trois coquilles saint Jacques percées de dagues. La possession d'armoiries personnelles, quoi qu'on en pense généralement, n'est pas un privilège de la noblesse.

Des apparences qui peuvent se révéler trompeuses
Reste l'essentiel, le plus spectaculaire et d'apparence le plus évident: l'affirmation, par le costume, du statut de pèlerin. Le gisant des Carmes est vêtu d'une chemise lacée sur la poitrine et d'un long manteau de peau retournée. Sa main droite serre un long bâton, le bourdon de pèlerin et son flanc gauche porte une besace marquée d'une coquille. La valeur instructive de cette figure est incontestable et mérite amplement la place qui lui est réservée dans l'iconographie des pèlerinages médiévaux. Affirmer comme une certitude que le bienfaiteur des Carmes a lui-même fait la route de Compostelle est un raccourci tentant que n'ont pas hésité à emprunter la majorité des auteurs sur la question. Une autre approche mérite d'être envisagée.
Depuis des siècles, les croyants ont accordé une très grande valeur rédemptrice aux pèlerinages lointains. Partir sur de longues distances et affronter les obstacles pour aller prier sur les reliques d'un martyr rachetait les fautes terrestres du pèlerin dans l'attente du Jugement dernier. D'autres attitudes salvatrices étaient reconnues comme le don aux établissements religieux, l'inhumation en terre consacrée avec récitation de prières pour le remède de l'âme du défunt, la participation, physique ou financière, à une croisade....
Pour la majorité des Grands, une, voire deux de ces initiatives, étaient suffisantes pour s'assurer d'une mort sereine. Dans le cas qui nous occupe, Pierre Pèlerin aurait accumulé trois actes rédempteurs, dont deux seulement sont prouvés: la participation à la fondation des Carmes et la fondation de sa sépulture dans l'abbatiale du couvent. Une question, dans cette perspective, ne trouve pas de réponse: un bourgeois, à la tête d'une entreprise prospère, avait-il le temps de s'absenter des mois durant, pour accomplir un vœu? Contrairement à toute attente, c'est peut-être les symboles les plus évidents gravés dans la pierre qui sont les plus subtils à interpréter, ce qui n'est pas inhabituel pour l'époque.

Un rébus de pierre grandeur nature
Arrêtons nous un instant sur les valeurs de la bourgeoisie au moment où le Moyen-Âge cède, lentement dans nos régions, la place aux aspirations nouvelles de la Renaissance. Comme dans toutes les périodes de transition, les gens sont partagés entre une ancienne culture, chargée de repères immuables, comme l'obsession et la crainte de l'enfer, et des attitudes beaucoup moins modestes que par le passé. L'apparence vestimentaire et physique, l'étalage de sa fortune, l'orgueil de sa réussite font leur place, et pour longtemps, dans les codes de reconnaissance des individus. L'angoisse de tomber un jour dans l'oubli conduit les uns et les autres à laisser des traces concrètes de leur séjour terrestre. C'est là qu'intervient une coïncidence trop flagrante pour être due au hasard: Pierre Pèlerin se fait représenter dans la pierre dans une tenue de pèlerin. A la même époque, un autre berrichon, Jacques Cœur, adopte comme blason une coquille saint Jacques et un cœur. Jean, duc de Berry, joue sur l'analogie entre le mot ours en anglais, et la première syllabe du nom de son duché et la traduit dans sa célèbre devise "Ursine le temps venra". Le temps est aux jeux de mots. Le gisant du musée Saint-Vic pourrait s'ajouter à la liste de ces messages sibyllins destinés à ces êtres futurs que nous sommes. Message particulièrement efficace si l'on songe que des milliers de saint-amandois qui vécurent à son époque, Pierre Pèlerin est un des rares dont l'Histoire ait conservé le souvenir.

© Olivier Trotignon, août 2011

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23 avril 2014 3 23 /04 /avril /2014 11:49

Toury4

 

Une fois n’est pas coutume, je vais déborder au delà des limites de l’ancien diocèse de Bourges pour vous présenter un monument funéraire médiéval d’un intérêt certain.
L’été dernier, à l’invitation de la compagnie de reconstitution médiévale “Les Compagnons du Sarment d’Hypocras”*, nous avons eu l’opportunité de visiter le château de Toury, au sud-est de Moulins, dans l’Allier.
Le propriétaire de la forteresse nous a présenté une curieuse dalle funéraire de provenance incertaine, amenée il y a de nombreuses années dans la cour du château et mise à l’abri des intempéries sous un auvent discret.

 

Toury1

 

Cette plate-tombe a été taillée dans un calcaire coquiller assez rugueux. L’épitaphe est incomplète, mais situe le défunt dans la lignée des propriétaires du château (en fait, un certain Guioz, arrière-grand-père de T{hibaud?} de Toury), ce qui explique qu’elle y ait été apportée. L’ouvrage date de 1291 ou 1391 (lacune dans l’angle supérieur droit).

 

Toury3

 

Elle présente des similitudes avec ses homologues berrichonnes: défunt représenté de face, en robe, épée à ses cotés; présence d’un chien et d’anges porteurs d’encensoirs. Des différences sont aussi à noter. La silhouette chevaleresque occupe un espace réduit et latéral, la croix séparant la plaque en quatre tableaux. Le chien n’est pas sous les pieds de son maître; l’épée n’est pas à la ceinture du chevalier.
Les modifications postérieures apportées à la surface de la dalle permettent d’imaginer une partie de son histoire.

 

Toury2

 

On remarque à la fois une découpe rectangulaire et des croix de consécration aux angles de la pierre. La dalle funéraire de Toury a servi de pierre d’autel. Constatant la présence dans les environ d’une abbaye cistercienne, à savoir Sept Fonds, on peut présumer que Guioz de Toury fut inhumé dans son cloître ou son abbatiale. Comme en Berry, le monastère a été délesté d’une partie de ses pierres tombales, converties en autels pour les églises paroissiales des alentours.
Ces pierres, d’un style particulier, ont été à leur tour retirées au profit de monuments plus sobres. Quelqu’un a eu à ce moment là l’excellente idée de l’amener celle-ci à Toury, la sauvant ainsi d’un destin plus qu’incertain. N’étant pas moderniste, j’ignore complètement la chronologie des ces dernières manipulations, mais l’ampleur du phénomène a peut-être laissé des traces dans certains registres paroissiaux.

 

Toury5

 

*Les lecteurs fidèles de ce blog connaissent ma plus extrême méfiance pour les troupes dites “médiévales”, souvent ramassis de joyeux fêtards auto proclamés chevaliers de ceci ou sires de cela. Les Compagnons du Sarment d’Hypocras ont un profil qui les distingue de ces groupes aux prétentions plus étendues que leurs compétences. Ils sont de ces très rares associations que je me permets de recommander.

© Olivier Trotignon 201

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10 avril 2014 4 10 /04 /avril /2014 08:36

galopin-Gargilesse-1

 

Les historiens de la féodalité relèvent dans certaines sources l’existence d’un premier jalon souvent méconnu dans la formation des futurs chevaliers. Bien avant qu’on commence à les éduquer au maniement des armes, les futurs combattants nés dans des familles nobles gravissaient un premier échelon de leur initiation, destiné à les familiariser avec l’univers des chevaux. Les apprentis-chevaliers recevaient alors pour mission de s’occuper des montures des hommes de guerre, de les entretenir, les manipuler et, probablement, de les monter à l’occasion. Le mot galopin, dont le sens a glissé vers d’autres attitudes enfantines, désignait à l’origine cette fonction.
Le Berry conserve une remarquable représentation d’un de ces garçons, peinte sous les voûtes de l’église basse de Gargilesse, dans l’Indre. Ce sanctuaire est un de ceux avec Nohant, Brinay et Chalivoy-Milon qui offrent les plus beaux ensembles de fresques romanes de toute la région.

 

galopin-Gargilesse-2

 

Le galopin qui y figure tient par la bride les chevaux des Rois mages, assis sur un rocher. Il n’est pas armé, mais tient tout de même une longue perche, pour tenir en bon ordre les trois bêtes.
Les connaisseurs apprécieront les détails des harnachements visibles sur les montures, selles de toile ou cuir et bois, mors à bascule, bride agrémentée de clous. On voit aussi très bien que les chevaux sont ferrés mais un détail intrigue: les fers sont munis de dentelures externes comme si ces chevaux étaient équipés pour monter des pentes très marquées. On utilisait encore ce genre de ferrure dans l’après-guerre pour aider les mulets qui débardaient du bois à ressortir des profonds ravins de la forêt de Tronçais.
L’avis des archéologues sur ce type de fers pourrait être intéressant pour évaluer la fréquence de leur emploi à la période romane.

© Olivier Trotignon 201

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29 mars 2014 6 29 /03 /mars /2014 08:05

antenne1

 

Dernièrement, profitant d’un bel après-midi d’hiver pour aller nous promener à Sancerre, nous avons eu le désagrément de trouver, non loin du donjon médiéval qui témoigne de l’importance de cette ancienne forte, une verrue technologique du plus mauvais effet: une antenne-relais -j’imagine pour téléphones portables- plantée sur un toit dans le périmètre immédiat de l’ancien château.

 

antenne2

 

Certes, on ne la voit pas de partout dans la ville, et on peut l’éviter sur les photos. Certes, l’économie locale fondée sur le négoce de Sauvignon se passe très bien de l’intégrité visuelle des vestiges du passé féodal de la cité, mais cela ne justifie pas qu’on ait accordé un permis de construire pour une pareille anomalie esthétique.
D’autres cités ont su dissimuler ce même genre de dispositifs dans des structures où ils n’accrochent pas le regard, arrivant à concilier les besoins de nos contemporains en communication et les besoins de nos prédécesseurs en dispositifs défensifs ou en constructions à caractère spirituel ou économique.
Il ne me semble pas inutile de rappeler aux uns et aux autres, surtout en cette période de renouvellement des équipes municipales, qu’un maire a la faculté d’interdire ce genre d’installations incompatibles avec les termes des plans d’occupations des sols. Antennes-relais de vidéo-surveillance ou de téléphonie mobile, volets roulants sur des façades médiévales, mobilier urbain posé sans apparence d’une ombre de réflexion devant des lieux visités heurtent beaucoup de gens, résidents comme personnes de passage. Tous s’en remettront, me direz vous, mais quel dommage de gâcher le plaisir qu’on peut avoir à se promener dans des lieux qu’il aurait pourtant été si simple de préserver.

 

antenne3

 

A titre personnel, je désapprouve doublement l’antenne de Sancerre qui trône en plein milieu des habitations, sans considération pour les effets néfastes à craindre pour la santé des gens qui vivent sur le site.

© Olivier Trotignon 201

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23 mars 2014 7 23 /03 /mars /2014 09:02

Allichamps

 

Il y a longtemps, un vieil ouvrier m’avait confié le secret du nom d’Allichamps: selon lui, il s’agissait des “champs d’Ali”, chef arabe survivant de la bataille de Poitiers, venu fixer l’Islam en pleine vallée du Cher. Bien plus tard, sa mosquée avait été remplacée par les Chrétiens par la chapelle qu’on peut voir encore aujourd’hui au milieu, ou presque, des champs.
Si mon informateur avait su tout ce que contient le sol de ce périmètre de la basse vallée du Cher, il aurait sans doute jeté Ali aux orties pour me parler de César et Charlemagne: Allichamps est un lieu à la stratigraphie complexe sur lequel aucune somme objective des connaissances le concernant n’a encore été réalisée.

 

Allichamps-sarcophage

 

Une des origines les mieux repérées est une petite agglomération gallo-romaine établie près d’un gué permettant à la voie antique Bourges - Néris de franchir le Cher. Une nécropole importante, à l’origine du toponyme -les Champs-Elysées gallo-romains étant devenus Allichamps) prolonge son activité bien au delà de l’Antiquité tardive. Des zones occupées par des sarcophages ont été détectées à plusieurs points du site. Une, actuellement, intéresse de très près les archéologues. Sa localisation précise ne peut être publiée, pour éviter les inévitables pillages.
C’est sur la fine couche de terre recouvrant cette immense cité des morts que les chanoines augustins de l’abbaye de Plaimpied, près de Bourges, ont bâti un prieuré dont on conserve aujourd’hui une bonne partie de l’ancienne chapelle prieurale.

 

Allichamps-chapitau

 

A l’époque où on me racontait les exploits de l’émir Ali, j’ai visité ce qui n’était encore qu’une grange poussiéreuse. En montant sur les bottes de foin, on arrivait au niveau des chapiteaux. Une association de bénévoles s’est saisie de l’endroit et, après des années de travaux, a pu lui rendre une partie de son lustre d’autrefois.
On est tout de suite frappé par la qualité du travail des tailleurs de pierre romans. Des modillons extérieurs aux chapiteaux intérieurs, l’expression artistique est d’une richesse presque égale aux sculptures de l’abbaye de Plaimpied. Entre autres curiosités, on observe des couvertures en lauzes, qui sont peut-être à associer aux bories qu’on voit dans les vignes entre Chavannes et Châteauneuf.

 

Allichamps-intérieur

 

Le prieuré d’Allichamps mérite une visite estivale et il est facile de profiter des expositions artistiques qui s’y tiennent pour découvrir l’intérieur. L’extérieur est accessible en toutes saisons.

 


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22 février 2014 6 22 /02 /février /2014 09:23

couleuvrine

 

Vous savez, si vous êtes un(e) habitué(e) de ces lignes que ce blog a pour principe de se tenir à l'écart des sujets racoleurs tout juste bons à récolter des points d'audience. Vous ne trouverez ici ni "Jacques Cœur, cet inconnu" ou "le secret des Templiers bientôt dévoilé", mais je ne répugne pas à me pencher parfois sur des cas curieux, qui aujourd'hui feraient la "une" de nos journaux, juste pour le plaisir de restituer une microscopique partie de ce que fut le quotidien de tous ces gens qui étaient là avant nous.
Voici aujourd'hui une affaire fort curieuse qui endeuilla les rues de Bourges dans les années 1480. Guillaume Archambault, charron au bourg de Saint-Sulpice, dans l'aire urbaine de Bourges, fut reconnu coupable du meurtre d'Aubin Souppire, puis gracié par le roi après avoir acheté sa rémission. Cet homicide est sans doute le plus surprenant de tous ceux dont j'ai pris connaissance depuis toutes mes années passées à travailler sur le Berry.
Le dit Archambault tua en effet l'infortuné Souppire d'un coup de couleuvrine, alors que ce dernier était costumé en Lucifer et répétait un mystère!
Accident? Geste prémédité? Je n'ai pas pu avoir l'original du procès pour examiner les arguments de l'accusé, mais, outre l'hypothèse d'une mise à feu accidentelle d'une arme de gros calibre - le mot couleuvrine désigne un ancêtre du mousquet - il est probable que le tireur, peut-être aidé par l'excellent vin produit dans la région, a vraiment cru voir le Diable. Le temps de se saisir d'une flamme, l'homme a fait ce que tout bon chrétien aurait fait à sa place: renvoyer le démon d'où il venait.
Au delà de cette anecdote, il est à noter, en ce début de Renaissance, l'évocation de mystères destinés à être joués en public, lors de fêtes religieuses. Ce genre de spectacle ne laisse en général pas beaucoup de traces dans la documentation d'époque.

© Olivier Trotignon 2014

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13 février 2014 4 13 /02 /février /2014 11:36

lion-Treignat

Treignat (03)

 

 

Voici une énigme qui n’a, à ma connaissance, pas encore trouvé de réponse satisfaisante. A la lisière méridionale de l’ancien diocèse de Bourges, dans la Marche et dans quelques secteurs du Limousin peuvent être observées de curieuses statues zoomorphes figurant ce qui peut ressembler à des lions.
Sculptées dans des granits vraisemblablement locaux, bien qu’il ne soit pas certain que cette donnée ait été rigoureusement vérifiée, ces statues sont disposées, pour la plupart d’entre elles, près des églises.
Plusieurs éléments intriguent: ces lions n’appartiennent à aucun style artistique identifié; leurs emplacements actuels ne sont pas d’origine, certains ayant été déplacés, d’après les recherches de certains confrères, assez récemment; ils ne sont pas ailés, donc ne semblent pas en rapport avec l’évangéliste saint Marc; on les trouve près d’églises très sobres, constituant parfois leur seul élément décoratif remarquable. En résumé, personne ne sait exactement d’où ils viennent, à quelle époque ils ont été réalisés, ni qui les a placés là.

 

lions-Toulx1

Toulx-Sainte-Croix

 

Des éléments originaux? C’est une hypothèse tout à fait recevable. Le fait de leur mobilité évidente - à Toulx-Sainte-Croix, les lions sont posés à l’emplacement de l’ancienne nef de l’église- n’exclut pas qu’ils soient contemporains de la construction des sanctuaires. Comme certaines croix, ou pierres tombales, ils ont pu être déplacés selon la volonté des habitants. Il n’est pas exclu qu’il y ait eu des translations d’une église vers une autre.

 

lion-Toulx2

Toulx-Sainte-Croix (23)

Des éléments rapportés? C’est également possible, mais cela implique qu’ils sont soit postérieurs, soit antérieurs à l’époque romane. S’ils sont postérieurs, leur façonnage ne ressemble à aucun style connu, ce qui laisserait penser à un travail artisanal de très piètre facture. S’ils sont antérieurs, le champ des possibilités s’élargit jusqu’à la période de l’occupation romaine, et expliquerait leur état d’usure prononcé, et des détails curieux, comme ce lion clairement sexué, visible sur la place de l’église de Treignat, dans l’Allier. Dans l’état de nos connaissances, il n’est pas possible d’infirmer ni de confirmer deux pistes, intellectuellement séduisantes, mais qui ne sont peut-être que des constructions de l’esprit:
le pillage d’anciens sanctuaires antiques, ce qui signifierait la reconnaissance d’un culte propre à la Marche et au Limousin. Sans éléments archéologiques en place, difficile d’aller plus loin en ce sens;
l’antériorité cultuelle des sanctuaires romans: les lions seraient là depuis toujours, l’église réoccupant un emplacement choisi par le clergé antique. Certes, le site de Toulx-Sainte-Croix ferait un bel oppidum gaulois ou gallo-romain, ou même mérovingien. A ce stade, même la présence de couches archéologiques anciennes ne suffirait pas à prouver une relation entre les lions et un quelconque culte païen.

 

lion-Chapelle-st-Martial

La Chapelle-saint-Martial (23)

 

Dernière énigme: leur fonction. Une première piste, la plus simple, serait de ne leur en reconnaître aucune. Les statues, suivant la dernière hypothèse, seraient là depuis toujours sans que personne n’ai consacré la moindre énergie à modifier cet état de fait, comme certaines ruines, ou mégalithes. On peut penser aussi, si ces lions sont antiques, à une simple vocation décorative: des paroissiens pillant des monuments antiques pour orner leur église n’a pas été un cas si rare que ça.
Une dernière hypothèse soulève la question d’une finalité spirituelle. Ces statues léonines ont peut-être été des instruments de la foi populaire. L’aspect “fondu” de la tête de certaines bêtes pourrait même s’expliquer par des soustractions rituelles de roche, comme on  constate ailleurs, dans des édifices religieux de grès ou de calcaire, des grattages parfois très profonds.

 

lion-Toulx3

Toulx-Sainte-Croix

 

Le conditionnel demeurera sûrement pendant longtemps le seul mode approprié à toute communication sur la question des lions de granit. Je m’abstiendrai donc de conclure, mais j’aimerais, avant de refermer ce dossier, vous encourager, si vous êtes familier de ces belles régions de la Creuse ou de la Haute-Vienne, à la plus grande vigilance sur le cas de statues qui pourraient ne pas avoir encore été inventoriées (bois, murs de pierres sèches, propriétés privées...), entières ou fragmentaires, et de faire part de vos découvertes aux services régionaux d’archéologie. La réponse à toutes nos interrogations se trouve peut-être à portée de main...

© Olivier Trotignon 2014

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7 février 2014 5 07 /02 /février /2014 23:07

 

affiche-Ainay

 

J’ai le plaisir de vous convier à deux de mes prochaines conférences dont les dates sont fixées et, hasard du calendrier, très rapprochées.

Le dimanche 16 mars, c’est en pays bourbonnais que j’espère vous retrouver à l’invitation de la médiathèque d’Ainay-le-Château, qui a réservé la belle chapelle Saint Roch pour que j’y expose une nouvelle version de ma conférence “Médecine, lieux de soin, saints guérisseurs et miracles en Berry”. La principale nouveauté sera l’emploi d’un vidéo-projecteur (version modernisée de nos anciens et toujours vaillants projecteurs de diapositives...) pour illustrer mon propos.
Merci à Nathalie Pasquier, animatrice de la Culture et du Patrimoine à Ainay, ainsi qu’à la municipalité, pour leur accueil.
Le nombre de places étant limité dans la chapelle, il est vivement conseillé d’être sur le site à 15h. Il est recommandé de stationner au pied des remparts et de se rendre à la chapelle par le petit pont.

 

© Olivier Trotignon 201

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Présentation

  • : Moyen-âge en Berry
  • : Rédigé et illustré par un chercheur en histoire médiévale, ce blog a pour ambition de mieux faire connaître l'histoire et le patrimoine médiéval du Berry, dans le centre de la France.
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Merci de l'intérêt que vous portez à l'histoire de la région.




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Conférences

conférence

 

Dans l'objectif de partager avec le grand public une partie du contenu de mes recherches, je propose des animations autour du Moyen-âge et de l'Antiquité sous forme de conférences d'environ 1h30. Ces interventions s'adressent à des auditeurs curieux de l'histoire de leur région et sont accessibles sans formation universitaire ou savante préalable.
Fidèle aux principes de la laïcité, j'ai été accueilli par des associations, comités des fêtes et d'entreprise, mairies, pour des conférences publiques ou privées sur des sujets tels que:
- médecine, saints guérisseurs et miracles au Moyen-âge,
- l'Ordre cistercien en Berry;
- les ordres religieux en Berry au M.A.;
- la femme en Berry au M.A.;
- politique et féodalité en Berry;
- le fait religieux en Berry de la conquête romaine au paleo-christianisme...
- maisons-closes et la prostitution en Berry avant 1946 (animation réservée à un public majeur).
Renseignements, conditions et tarifs sur demande à l'adresse:
Berrymedieval#yahoo.fr  (# = @  / pour éviter les spams)
Merci de diffuser cette information à vos contacts!

Histoire locale

Pour compléter votre information sur le petit patrimoine berrichon, je vous recommande "le livre de Meslon",  Blog dédié à un lieu-dit d'une richesse assez exceptionnelle. Toute la diversité d'un terroir presque anonyme.
A retrouver dans la rubrique "liens": archéologie et histoire d'un lieu-dit

L'âne du Berry


Présent sur le sol berrichon depuis un millénaire, l'âne méritait qu'un blog soit consacré à son histoire et à son élevage. Retrouvez le à l'adresse suivante:

Histoire et cartes postales anciennes

paysan-ruthène

 

Cartes postales, photos anciennes ou plus modernes pour illustrer l'Histoire des terroirs:

 

Cartes postales et Histoire

NON aux éoliennes géantes

Le rédacteur de ce blog s'oppose résolument aux projets d'implantation d'éoliennes industrielles dans le paysage berrichon.
Argumentaire à retrouver sur le lien suivant:
le livre de Meslon: non à l'éolien industriel 

contacts avec l'auteur


J'observe depuis quelques mois la fâcheuse tendance qu'ont certains visiteurs à me contacter directement pour me poser des questions très précises, et à disparaître ensuite sans même un mot de remerciement. Désormais, ces demandes ne recevront plus de réponse privée. Ce blog est conçu pour apporter à un maximum de public des informations sur le Berry aux temps médiévaux. je prierai donc les personnes souhaitant disposer de renseignements sur le patrimoine ou l'histoire régionale à passer par la rubrique "commentaires" accessible au bas de chaque article, afin que tous puissent profiter des questions et des réponses.
Les demandes de renseignements sur mes activités annexes (conférences, contacts avec la presse, vente d'ânes Grand Noir du Berry...) seront donc les seules auxquelles je répondrai en privé.
Je profite de cette correction pour signaler qu'à l'exception des reproductions d'anciennes cartes postales, tombées dans le domaine public ou de quelques logos empruntés pour remercier certains médias de leur intérêt pour mes recherches, toutes les photos illustrant pages et articles ont été prises et retravaillées par mes soins et que tout emprunt pour illustrer un site ou un blog devra être au préalable justifié par une demande écrite.