A la lecture de l’article précédent, plusieurs d’entre vous m’ont signalé de coupables oublis, qui ont nécessité une relecture complète de l’ouvrage compilant tous les croquis de Claude Chastillon, disponible en libre accès sur le site Gallica. Si les dessins sont bien indexés par l’éditeur, ils ne sont pas, dans l’ensemble, regroupés par provinces. Ainsi, des places-fortes du Berry peuvent compléter des planches figurant d’autres régions. On constate que le Berry a été particulièrement bien traité par le géographe. D’autres provinces, comme l’Auvergne et le Bourbonnais n’ont été que peu, ou pas du tout, visitées par le topographe.
J’espère, cette fois, ne rien avoir omis. Merci pour votre relecture et votre vigilance.
Charenton
Oubli impardonnable, d’autant plus que j’avais déjà exploité ce dessin dans un précédent billet, la représentation de la petite ville de Charenton, dans le Cher, déroute par ses proportions qui la rendent méconnaissable au premier regard. Héritière d’un très long passé féodal, son patrimoine actuel semble dérisoire comparé à ce qu’en a vu Chastillon en son temps.
Les Aix-d’Angillon
Les choix de perspectives retenus par l’auteur sont plus raisonnable que pour l’exemple précédent, si on oubli la place démesurée accordée à l’église du lieu. L’orthographe moderne de cette ville rappelle, phonétiquement, le vocabulaire de ses fondateurs. Aix est du déformation du latin Haia, la haie, soit la défense végétale autour d’une forteresse, établie par le seigneur Gilon de Sully, dont le patronyme n’a pas changé avec le temps. Le préfixe « dan » est une déformation du terme médiéval « dam », issu du latin dominus (seigneur), titre qui était aussi attribués à des figures religieuses. On trouve ainsi des bourgades nommées Dampierre, Danmartin, Danmarie dans plusieurs région de France.
Aubigny-sur-Nère et Argent-sur-Sauldre
Toujours dans le même secteur géographique, ces deux villes ont attiré Chastillon. Ne travaillant pas sur la partie septentrionale du Berry, j’ai peu de renseignements sur ces deux bourgades à l’époque médiévale et peine à apprécier l’évolution de leur patrimoine bâti.
Saint-Brisson
Trop éloignée de la région sur laquelle porte la majorité de mes recherches en anthroponymie, j’avais fait l’impasse sur cette ville de l’espace ligérien, pourtant bien berrichonne. Voilà l’erreur réparée.
Mézières-en-Brenne
Encore plus éloignée de mes points de repère, cette ville du département de l’Indre ne présente aucune trace de ruine au moment où le topographe en reproduit l’image. Le plan circulaire initial est bien visible, ainsi que les fossés humides, alimentés par un canal prélevant l’eau de la Claise, toute proche.
A l’époque du roi Henri IV, Claude Chastillon, topographe et architecte au service de son souverain, parcourt la France en réalisant des centaines de croquis de places fortes, villes, monuments remarquables et plans de grandes batailles.
De sa visite en Berry demeure une quinzaine d’estampes croquant quelques villes et monuments ayant peu de rapports les uns avec les autres. On s’étonne de certaines absences: de passage en vallée du Cher, le topographe dessine les ruines gallo-romaines de Drevant et celles, médiévales, du château d’Orval, mais semble de pas s’être arrêté devant la forteresse de Montrond, une des places-fortes les plus monumentales du secteur. Il se peut que des dessins se soient perdus avant l’édition posthume de son œuvre, qui reste un témoignage irremplaçable sur l’état patrimoine monumental régional à l’aube du Grand siècle.
L’amphithéâtre de Drevant
C’est le plus vieux monument de l’ancienne province de Berry qui apparaît dans le recueil de dessin de l’ancien géographe. Déjà partiellement remblayée à l’époque moderne, l’enceinte antique conserve des traces de son passé médiéval, à savoir les restes de la chapelle castrale attenante à l’ancien donjon des seigneurs de Charenton. Le puits contemporain du château, encore visible aujourd’hui, est aussi figuré. Un détail curieux attire l’attention: on remarque une sorte de ruisseau qui s’écoule vers le Cher et qui traverse le périmètre de l’ancien théâtre. Sachant que l’ensemble se trouve à faible distance d’un établissement thermal, probablement à caractère religieux, alimenté par au moins deux aqueducs, se pourrait-il que l’un d’entre eux ait été crevé et perde son eau au moment de la visite de Chastillon?
Le château d’Orval
De ce château qui fut au centre d’une puissante châtellenie ne demeure aujourd’hui presque aucune trace. Le croquis est sommaire mais permet d’identifier plusieurs éléments de l’ancienne forteresse, dont un donjon, une tourelle d’escalier menant à des étages dont ne restent que les anciennes croisées. Très précis sur les aménagements militaires, Chastillon dessine avec une certaine précision l’ancienne barbacane défendant l’entrée de l’ensemble fortifié. Nous connaissons un autre exemple de ce type d’aménagement devant l’emplacement du château de Belleperche, dans l’Allier. En général, ces ouvrages défensifs datent de la Guerre de 100 ans. Deux poivrières, ou latrines, apparaissent aux angles du rempart.
La ville fortifiée de Bruère-Allichamps
Chastillon, qui suit la vallée du Cher, s’attarde sur un ensemble qui n’a rien de spectaculaire, Bruère-Allichamps, modeste ville fortifiée et déjà fortement délabrée dont il exagère les proportions.
Le château de Meillant
Le tableau conserve le souvenir de cette belle enceinte fortifiée médiévale fortement embellie à l’époque de la Renaissance, et permet d’imaginer à quoi ressemblait l’ensemble avant que soit rasée une partie des bâtiments et des remparts.
Culan
Autre place-forte fortement amputée d’une grande partie de ses défenses, Culan, à l’époque de Chastillon, possède encore sa porte et son gros donjon circulaire.
Boussac et Châteaumeillant
La première dans la Creuse, et la seconde dans le sud du Cher, Boussac et Châteaumeillant
apparaissent, sous le trait de crayon de Chastillon, comme des villes d’une étendue et d’un patrimoine bâti considérables. Les proportions, comme ailleurs, sont suspectes. La motte castrale du premier château de Châteaumeillant, de dimension ordinaire, semble démesurée. Les deux dessins restituent, comme dans les cas précédents, des éléments de paysages urbains depuis longtemps démolis.
Le Châtelet en Berry
Proche de Châteaumeillant, cette bourgade au riche passé féodal, n’est plus reconnaissable aujourd’hui, son très important château-fort ayant perdu la majeure partie de ses défenses. On remarque quand même la présence, sur la colline au nord de la cité, la petite abbaye de Puyferrand.
Chastillon s’était perdu dans ses notes, plaçant la ville « en la marche du Limousin » qui, certes, n’est pas très éloignée vers le Sud.
Dun-sur-Auron, anciennement Dun-le-Roi
Là encore, le dessinateur exagère les proportions de cette belle ville dépendant du domaine royal depuis le XIe siècle, jusqu’à la rendre méconnaissable. Le donjon de Philippe Auguste semble intact.
La grosse tour de Bourges
Autre donjon augustéen, la grosse tour est le seul monument de Bourges croqué par Chastillon qui s’intéressait, faut-il le rappeler? essentiellement au patrimoine militaire. Il existe d’autres dessins de ce donjon, qui confirment tous l’importance considérable de cette tour dans le paysage urbain berruyer.
Le donjon de Châtillon-sur-Indre
Beaucoup plus à l’ouest, aux portes de la Touraine, Châtillon était elle aussi protégée par un gros donjon cerné par une enceinte. On observe que la ruine a commencé à frapper cet ensemble, dégarni de sa toiture, dont les murs commencent à s’effondrer et à être gagnés par la végétation.
Le siège de Sancerre
Des estampes ramenées du Berry par le topographe, celle qui figure Sancerre est la plus incertaine, non pas sur la localisation, mais sur la précision du trait et l’exagération manifeste de la hauteur des bâtiments. Projet unique en Berry, mais connu ailleurs dans le royaume, le dessin ne représente pas la ville de Sancerre mais le siège qu’elle a subit en 1573. Le tableau intéressera plus les spécialistes d’histoire militaire que le médiéviste, de nombreux détails sur les aménagements offensifs y sont visibles.
Les châteaux de Souesmes, La Motte-Beuvron, Beaugy et Jussy-Champagne
Etant très peu renseigné sur ces quatre places dessinées par Chastillon, je me contenterai de reproduire ici les estampes qui les concernent. Seul le château de Beaugy présente des reliefs médiévaux observables, ruinés au moment du passage du dessinateur.
Scellé dans un mur de l’abbatiale de l’ancienne abbaye de Plaimpied, un rare ensemble de plaques funéraires du XIIe siècle attire l’attention. Finement gravées sur des bloc de calcaire fin, une douzaine d’épitaphes de chanoines augustins rappellent les noms de quelques uns des premiers occupants du lieu. Cet ensemble, décrit dans un article d’A. Buhot de Kersers publié dans les Mémoires de la Société des antiquaires du Centre en 1886-87 (XIVe volume)* serait, à ma connaissance, un élément patrimonial unique en Berry.
Les inscriptions funéraires ne portent aucune date, mais les lettres qui composent les épitaphes évoquent, pour les spécialistes, des styles d’écritures antérieurs au XIIIe siècle, comme on en trouve sur d’anciens parchemins conservés dans les archives monastiques
Les noms des défunts ne révèlent aucune particularité si on les compare à ceux des moines cités dans les actes médiévaux: Arnulf, Umbert, Girard, Radulf (Raoul), Gui, Etienne et Guillaume sont courants tant dans le monde des religieux que dans celui des chevaliers berrichons. Seul Sulpice est un peu moins ordinaire, tout en étant le vocable sous lequel était connue la plus grande abbaye de la région, Saint-Sulpice de Bourges, de nos jours disparue.
Pour rendre plus facile la lecture des inscriptions choisies pour illustrer ces lignes, il m’a semblé judicieux de les comparer aux relevés publiés par Buhot de Kersers dans son article de 1886, facile à consulter sur le site Gallica.
Je ne peux que vous inviter à (re)découvrir l’abbaye augustine de Plaimpied et son prieuré d’Allichamps, à quelques dizaines de kilomètres plus au sud.
* A. Buhot de Kersers, Inscriptions murales de l’église de Plaimpied (Cher), Mémoires de la Société des antiquaires du Centre, XIVe volume, pp.35-51, 1886-1887
Les quelques lignes qui suivent n’ont rien à voir avec mes recherches habituelles, mais m’ont été inspirées par une récente visite du Palais Jacques-Cœur à Bourges.
Passant les concours de l’Education nationale dans les années 90, je m’étais inscrit à une journée de découverte du palais pour les personnels enseignants, titulaires ou non. L’animateur de cette session nous avait fait visiter les caves de l’édifice, et ainsi découvrir une curieuse collection d’œuvres déclassées, ayant trôné un temps dans les salles du palais avant d’être reléguées là à cause de leur caractère anachronique ou d’erreurs stylistiques.
Sous ces voûtes centenaires nous fut racontée une curieuse anecdote.
Alors que le palais du grand argentier était en pleine mutation, au XIXe siècle, disparut un des tableaux ornant ce qu’il est convenu d’appeler la tribune des musiciens, dans la salle de réception connue sous le nom de Salle des festins. Au moment de la restauration du monument, il fut décidé de remplacer la pierre manquante par une copie exécutée par les tailleurs de pierre engagés dans l’embellissement de l’édifice, privé de plusieurs de ses ornements médiévaux. L’endroit aurait pu rester en l’état jusqu’à ce qu’un habitant de Bourges, propriétaire d’un garage et ayant fait l’acquisition d’une automobile, décide de débarrasser le dit garage de divers mobilier l’encombrant dont une grande dalle de pierre, posée sur champ, comme on peut l’imaginer.
La surprise fut totale lorsque que les hommes chargés de déplacer la dalle, en la retournant, découvrirent une frise de coquilles saint-Jacques et de cœurs polychromes, plaquée depuis un temps indéterminé contre le mur du garage.
Le parement médiéval retrouva le palais où, après avoir déposé sa réplique, on put le remettre à sa place primitive.
Le fac-simile, devenu totalement inutile, fut entreposé dans les sous-sols, parmi d’autres œuvres récentes et délaissées, mais ayant toutes, d’une façon ou d’une autre, contribué à la très riche histoire de la demeure berruyère du célèbre Jacques-Cœur.
Les auditeurs qui m’ont fait le plaisir de venir écouter mon exposé, sur site, sur le château primitif de Montrond, lors des Journées du Patrimoine 2024, ont été les premiers à qui j’ai pu faire remarquer une curiosité toponymique: le nom même de « Mont-rond ».
Ce nom, qui forme presque à lui seul l’identité de la ville qui le porte « Saint-Amand-Montrond » n’a, en lui même, rien de remarquable. Formé de l’addition d’un radical et d’un suffixe, il nous est connu pour la première fois dans un acte acte de 1224-1225 citant la forteresse construite ou en cours de construction:
« forteritia Montis-rotundi ».
Un détail, toutefois, a retenu mon attention. Si on recense les noms de lieux en altitude dans le paysage local au XIIIe siècle (collines, élévations de terrain, bords supérieurs des vallées alluviales…), on constate que les Berrichons médiévaux emploient presque exclusivement le mot « Puy » (en latin podium) pour désigner ces formes de relief.
Depuis, ces toponymes ont disparu des cadastres (mine d’argent de Puy d’Habert, vers Bruère-Allichamps, léproserie de Puy-David, près de Châteauneuf…) ou ont dégénéré en Piot (le Piot-Gré = le Puy-au-Gré), en Pied (le Pied-de-Coust = le Puy de Coust) ou en Peu (le Peu-Feuilloux, en vallée du Cher).
Une exception notable, sur laquelle je n’ai pas eu le temps de travailler: Montluçon, également en vallée du Cher, contemporaine de Montrond.
On peut donc émettre l’hypothèse suivante. Renaud de Montfaucon, seigneur de Charenton et bâtisseur de Montrond, est un homme originaire de la Champagne berrichonne, proche de Bourges. Il est probable que sa langue maternelle soit le français parlé dans la zone d’influence des Capétiens. Il nomme son nouveau château « Montrond ». En ce début de XIIIe siècle, le sud de l’actuel département du Cher, où il exerce son nouveau rôle de seigneur de Charenton après son mariage avec l’héritière des premiers chevaliers de cette localité, parle très probablement une autre langue, proche des parlers du Sud. La disparition des toponymes anciens ou leur dégénérescence serait un signe d’un lent glissement linguistique dont le seigneur de Montrond est peut-être, intentionnellement ou non, un élément déclencheur.
J’écris ces quelques lignes principalement à l’intention des lecteurs éloignés du département du Cher, qui n’auraient pas accès à la presse locale.
Cette presse a, dernièrement, abondamment commenté un évènement que beaucoup de monde, dans la région, espérait: le château de Culan a enfin trouvé de nouveaux propriétaires. Ceux-ci, sitôt la vente conclue, ont invité la population, les élus, les représentants de la République, la presse, à venir les rencontrer dans la cour du château, afin d’exposer leurs projets pour la forteresse.
L’historien que je suis se réjouit de cette nouvelle, à plusieurs titres.
Les acquéreurs ne sont pas des amateurs en la matière. Forts d’une longue expérience acquise après l’achat de plusieurs forteresses médiévales, une en Auvergne et l’autre dans le Berry, ils savent exactement à quoi ils s’attaquent. Ils ne s’agit pas d’obscurs investisseurs plus attirés par des avantages fiscaux que par la qualité du monument, et encore moins de grands enfants gâtés jouant avec un château Playmobil grandeur nature.
Nous l’avons bien compris, Culan ne rouvrira pas au public avant que d’importants travaux de consolidation des structures médiévales aient été réalisés. Les toitures des deux tours flanquant la façade la plus connue sont proches de la ruine et devront être bâchées. Culan aura longtemps l’aspect d’un chantier garni d’échafaudages, pas très esthétiques, mais nécessaires. Aucune date ne peut être avancée pour une future réouverture de l’ensemble à la visite.
Le château de Culan occupe une place à part dans le cœur des régionaux. Il a un impact paysager exceptionnel car visible d’une route très fréquentée. Longtemps, il a accueilli des expositions prestigieuses et a été un moteur de l’économie locale. Il a même été l’objet de légendes, l’une d’elle affirmant que Jeanne d’Arc y aurait séjourné, fait depuis longtemps démenti par l’historien Emile Chénon.
Pour moi, Culan est une sorte de borne dans mes recherches, ayant découvert ses premiers seigneurs dès 1984, année de mon inscription en Maîtrise. Le voir protégé et mis en valeur me réjouit.
Quarante-deux ans après y avoir donné mon dernier coup de pioche, je serai de retour sur le site de la forteresse médiévale et post-médiévale de Montrond samedi 21 septembre, dans le cadre des Journées du Patrimoine.
L’animation que j’ai prévue, en accord avec la direction du site et la municipalité de Saint-Amand, propriétaire des ruines de Montrond, de présenter au public, que j’espère nombreux, abordera les thèmes suivants:
Montrond avant le Moyen-Âge, une première occupation antique?
le premier château féodal (début XIIIe siècle),
les fouilles de 1982 au pied du donjon (menée par une petite équipe que j’ai eu la joie d’encadrer): quels enseignements sur l’édifice?
la place de ce donjon sur la carte politique du Berry du Sud à l’époque des Croisades.
Le rendez-vous est prévu à 10h sur la plate-forme de la forteresse, la visite des ruines pouvant durer 1h30 environ. L’accès est aisé, mais des chaussures confortables peuvent être un plus.
L’animation est gratuite, mais notez bien qu’il ne s’agit pas de la visite de l’ensemble de l’ancien chantier de fouilles, seulement du périmètre du premier château.
Je tiens à exprimer ma gratitude envers la municipalité actuelle de Saint-Amand-Montrond, propriétaire de la forteresse, qui a autorisé la tenue de cette animation et surtout remercier Marylène Bigot, animatrice du site, qui a permis la concrétisation de ce projet.
J’aurai une pensée émue pour mon camarade Gilles Courtoux, qui nous a quitté au cours de l’hiver dernier, et à qui je dédie cette matinée. Gilles nous avait rejoint en 1980, avait participé aux fouilles des tours d’Orval et de l’Emir et surtout à celles de 1982, au pied du donjon.
Que la terre lui soit légère!
Au plaisir de vous rencontrer, ou retrouver, pour cette animation inédite!
Une récente conférence « L’armée d’Ecosse au secours du royaume de France, 1419 - 1429 » présentée par m. Patrick Gilles m’a rappelé une curieuse légende qui circulait naguère (et peut-être encore aujourd’hui?) autour de la forêt de Tronçais, dans le département de l’Allier.
Des vétérans écossais se seraient établis dans cette partie du Bourbonnais non loin de l’endroit où s’étendrait quelques siècles plus tard l’étang de Pirot.
En souvenir de cette occupation calédonienne, le lieu aurait été baptisé « Les Ecossais ».
Le fait que des combattants venus des hautes terres d’Ecosse soit venus soutenir le roi Charles VII dans sa guerre contre le roi d’Angleterre est abondamment documenté et irréfutable. La présence de certains de ces mêmes soldats aux abords du ruisseau de la Marmande, elle, en revanche, ne semble aucunement renseignée. Une recherche dans la littérature scientifique produite sur cette période de la Guerre de cent ans ne donne aucun résultat.
Je me permettrais donc d’envisager une piste phonétique pour expliquer l’origine de ce toponyme intriguant.
Dans le département du Cher, tout proche, peuvent être relevés plusieurs noms de lieux connus sous l’appellation « les Ecoussats ». Ce terme est à rapprocher d’un verbe en moyen français, « escousser » (source CNRTL) signifiant secouer, battre le lin ou le chanvre, pour le débarrasser de ses impuretés (ancêtre du moderne "écosser").
Remarquant que le lieu-dit « les Ecossais » se trouve tout près de la Marmande, et que de nombreux petits cours d’eau servaient aux population riveraines pour faire rouir les fagots de chanvre, le toponyme peut s’expliquer sans faire appel à l’"Old alliance » entre la France et l’Ecosse.
Des approximations phonétiques sont parfois observées sur des cadastres, dessinés par des géomètres ne possédant pas les accents régionaux. Il existe un bois nommé sur les cartes « l’Affourée », en vallée du Cher. Je suppose que le topographe n’a pas compris qu’en patois berrichon, « la forêt » ne se prononçait pas de la même manière que là d’où il était originaire. C’est probablement une méprise similaire qui a transformé un Ecoussat en Ecossais.
Je reproduis ici quelques unes des observations soumises au public de ma dernière conférence dédiée à l’Ordre de Cîteaux en Berry. Si la filiation des abbayes régionales est parfaitement connue - Guy Devailly en avait exposé le détail dans sa thèse - la visualisation du phénomène, sous forme d’une cartographie simplifiée, permet d’avoir une vision assez juste du phénomène.
Le diocèse de Bourges comptait quinze monastères cisterciens. Parmi eux, aucune filiale directe de Cîteaux: sept abbayes sont petites-filles de Cîteaux, cinq arrières-petites-filles, deux sont des filiales de monastères berrichons et un couvent, Beauvoir, échappe à toute règle.
1) Varennes, la Colombe
ces deux abbayes du sud du diocèse sont parentes de l’abbaye de Preuilly, l’une en filiation directe (la Colombe), l’autre indirecte (Varennes) par Vauluisant, fille de Preuilly.
2) Le Landais, Barzelle
Dans le nord de l’actuel département de l’Indre, existaient deux monastères attachés à l’abbaye de l’Aumône, au nord de la Loire, qui fonde le Landais, elle-même fondatrice de Barzelle. On remarque la proximité géographique de ces trois lieux.
3) Olivet, Loroy (ou Lorroy)
Ces deux établissements établis dans la partie septentrionale du diocèse, sont aussi relativement proches l’un de l’autre et de leur maison-mère, la Cour-Dieu, établie dans l’Orléanais.
4) Chalivoy, Aubignac
Sous la tutelle de Pontigny, ces deux maisons sont bâties aux lisières Nord et Sud de l’archevêché, Aubignac, petit établissement comparé à son homologue de Chalivoy, étant lui-même filiale d’un monastère limousin, Dalon.
5) Les filiales de Clairvaux
Sous la houlette de la grande abbaye de l’Aube se trouvent les deux plus puissantes abbayes cisterciennes du Berry, Fontmorigny et la Prée, elle-même fondatrice de la très éphémère Bois-d’Habert. Plus modestes, Noirlac, en filiation directe et les Pierres, fille d’Aubepierre, se situent plus vers le sud de la région.
6) Les monastères féminins
L’abbaye de Bussière, petite-fille du Tart et filiale de l’auvergnate Eclache, est visitée et corrigée par Noirlac.
Echappant au modèle cistercien, sa sœur de Beauvoir, fondée entre Vierzon et Mehun-sur-Yèvre, dans le Cher, n’a pas de filiation connue, pas plus que de monastère masculin correcteur.
Sans entrer dans le détail, on constate la large dispersion géographique des abbayes-mères qui montre que l’implantation de Cîteaux n’est pas le fruit d’une politique concertée. Il serait intéressant de retrouver l’origine des féodaux fondateurs et principaux donateurs, probable réponse à cette pluralité d’influences.
Cette année encore, l’association des Amis du prieuré Saint-Etienne d’Allichamps m’a invité à venir présenter une partie du contenu de mes recherches sous forme d’une conférence sur l’Ordre de Cîteaux en Berry et plus particulièrement sur certaines questions qui se posent sur l’histoire de l’abbaye voisine de Noirlac, des origines jusqu’à la période révolutionnaire.
Plusieurs raisons motivent ma présence à Allichamps le 6 juillet.
Tout d’abord, mon soutien, avec mes moyens de médiéviste indépendant, à une association qui se bat pour sauvegarder un élément essentiel du patrimoine monumental régional et en préserver l’accès au public dans les années à venir.
L’entrée, puis la visite de la priorale, seront libres et gratuites et les dons seront les bienvenus, au profit de la restauration du monument.
Ensuite, il est normal, et je pense que nul n’ira s’en plaindre, qu’en tant que contribuables qui rendez possible le fonctionnement de ce service public que sont les Archives départementales (du Cher, de l’Indre, de la Creuse, de l’Aube) qui conservent les documents sur lesquels je travaille, vous soyez informé(e)s du contenu de mes recherches.
Enfin, ça sera pour moi l’occasion d’invoquer la mémoire de mon grand-père, Jacques Trotignon, qui s’était, en son temps, beaucoup consacré à la sauvegarde d’Allichamps.
Je vous attends donc ce 6 juillet à partir de 17 heures, pour une animation, avec de nombreux visuels inédits, d’environ 1h30.
C’est un vieux monument en campagne, l’accès aux personnes à mobilité réduite y est moins aisé que dans un auditorium de ville, mais néanmoins tout à fait possible.
N’hésitez pas à partager cette annonce avec vos contacts et à venir sur place re(découvrir) un lieu rare qui a besoin de votre soutien.
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Rédigé et illustré par un chercheur en histoire médiévale, ce blog a pour ambition de mieux faire connaître l'histoire et le patrimoine médiéval du Berry, dans le centre de la France.
Dans l'objectif de partager avec le grand public une partie du contenu de mes recherches, je propose des animations autour du Moyen-âge et de l'Antiquité sous forme
de conférences d'environ 1h30. Ces interventions s'adressent à des auditeurs curieux de l'histoire de leur région et sont accessibles sans formation universitaire ou savante préalable. Fidèle aux principes de la laïcité, j'ai été accueilli par des associations, comités des fêtes et d'entreprise, mairies, pour des conférences publiques ou privées
sur des sujets tels que: - médecine, saints guérisseurs et miracles au Moyen-âge, - l'Ordre cistercien en Berry; - les ordres religieux en Berry au M.A.; - la femme en Berry au M.A.; - politique et féodalité en Berry; - le fait religieux en Berry de la conquête romaine au paleo-christianisme... - maisons-closes et la prostitution en Berry avant 1946 (animation réservée à un public majeur). Renseignements, conditions et tarifs sur demande à l'adresse: Berrymedieval#yahoo.fr (# = @ / pour éviter les spams) Merci de diffuser cette information à vos contacts!
Pour compléter votre information sur le petit patrimoine berrichon, je vous recommande "le livre de Meslon", Blog dédié à un
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NON aux éoliennes géantes
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J'observe depuis quelques mois la fâcheuse tendance qu'ont certains visiteurs à me contacter directement pour me poser des questions très précises, et à disparaître ensuite sans même un mot de
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