Après avoir examiné les vastes dispositifs radio concentriques d’Issoudun et de Dun-sur-Auron, revenons à des ensemble de plus petite dimension mais tout aussi remarquables, tel le terroir circulaire du lieu-dit Mirebeau, sur la commune de Verneix, dans la vallée du Cher.
Sur le terrain, sans l’aide de la photographie aérienne, l’ensemble défensif de Mirebeau passerait presque totalement inaperçu s’il ne restait pas quelques menus vestiges des fossés humides qui ont protégé la très probable motte érigée en son centre. Comme dans de multiples endroits, le dôme de terre qui soutenait l’ancien ouvrage défensif en bois a été arasé et on a conservé des fossés que des mares destinées à abreuver les animaux de ferme.
Les reliefs de cet ensemble défensif médiéval sont perceptibles grâce à une simple carte topographique au 25.000e. Dans cette région de bocage encore épargnée par les ravages paysagers des remembrements, les haies vives qui fossilisent les anciens tracés sont reconnues par les logiciels cartographiques de l’I.G.N.
C’est bien entendu par le survol par avion, hors de mes moyens, du site et par les photographies satellites disponibles sur internet que l’endroit révèle le rigoureux ordonnancement des parcelles qui le composent. Le centre de l’aménagement est occupé par l’emplacement de l’ancien château. Deux cercles concentriques -750 m. de diamètre pour le plus grand - délimitent une surface qui peut correspondre au schéma traditionnel d’exploitation des sols à l’époque féodale, le premier cercle pouvant délimiter la réserve seigneuriale et le deuxième cercle les tenures paysannes, comme nous l’avions déjà suggéré pour le terroir radio concentrique voisin de la Bruyère-l’Aubespin.
Outre ce château de la Bruyère, lui aussi entouré d’une très belle structure en anneaux, je me permet d’attirer l’attention du lecteur sur l’existence d’un parcellaire similaire plus à l’est de la région, autour du bourg de Malicorne, proche de Commentry, dans un contexte plus urbanisé que les deux exemples précédents.
Malicorne (03)
En l’absence de données archéologiques formelles, nous devons nous limiter à de simples observations pour tenter d’interpréter les raisons qui ont poussé les gens du Moyen-âge à organiser leur environnement sur un mode aussi géométrique. La première question qui se pose concerne la rareté de ces terroirs. S’agit-il d’exceptions, produits de la réflexion avisée de seigneurs plus clairvoyants que leurs voisins, ou s’agit-il de fossiles bien préservés d’un usage universel à l’époque, mais devenu rare à observer du fait des évolutions des paysages? S’agit-il d’une pratique dévolue à un modèle économique reposant sur l’exploitation différenciée des sols - espace cultivé pour les besoins du seigneur, espace cultivé pour les besoins élémentaires des paysans vivant sur place, le tout protégé des agressions extérieures par des grosses haies, forêt et friches alentours utilisées pour la pâture des animaux, la cueillette et la chasse? S’agissait-il de fondations militaires volontairement limitées dès leur création au strict nécessaire pour permettre aux occupants du lieu de survivre et ainsi contrôler les risque de développement de pouvoirs parallèles et forcément un jour concurrents de l’autorité qui les mettait en place?
Indépendamment du caractère relativement esthétique et harmonieux de ces traces au sol photographiées depuis l’espace, ces terroirs radio concentriques mériteraient une étude comparative spécifique qui pourrait aider à répondre aux questions qu’on se pose sur leurs origines.