C’est une très intéressante découverte qui a été faite en novembre 2014 à Urçay, dans le département de l’Allier, par une équipe d’archéologues de l’INRAP Auvergne dirigée par m. Philippe Arnaud. Dans un niveau profond proche des fondations de l’église du village a été trouvé une rare obole du roi Lothaire (954-986). Cette petite pièce d’argent, apparemment en assez bon état pèse moins d’un gramme pour un diamètre de 17 mm et a été frappée à Bourges, comme l’indique son revers où est apparent le mot « Biturici ».
Il est impossible de connaître sa date d’émission ni, à fortiori, celle à laquelle elle a été perdue ou abandonnée dans le sous-sol du village d’Urçay mais l’essentiel n’est pas là. Cette monnaie, ainsi que la manière de construire les fondations du sanctuaire du village, prouvent une activité humaine antérieure à l’an 1000 dans un secteur de la vallée du Cher sur lequel nous n’avons aucune documentation historique. La prétendue dépendance de l’église vis à vis de l’abbaye Saint-Cyr de Nevers repose sur une homonymie : le « Urziaco », noté en 888 dans la charte 34 du cartulaire de la dite abbaye, est à identifier avec la paroisse d’Urzy, proche de la cité nivernaise.
Dans le désert documentaire qui caractérise une grande partie du Berry du Sud avant la période féodale, l’archéologie est la seule ressource dont l’historien puisse se servir pour tenter une ébauche de carte de la présence humaine au cours de cette longue période qui va de la fin de l’Empire romain à l’édification des premiers châteaux de terre et de bois. Dans le cas présent, le sondage des professionnels de l’INRAP prouve l’existence d’une église antérieure à la période romane dans le bourg d’Urçay. Un niveau de sarcophage a été aussi révélé.
Que conclure à partir de ces informations ?
Trop peu de sites ont été fouillés de manière méthodique dans cette portion de la vallée du Cher pour tenter une approche raisonnée de l’occupation des sols à la période pré-féodale. Une constante cependant : la matière composant les sarcophages d’Urçay et de Drevant (à quelques kilomètres en aval) n’est pas locale. Les lourdes cuves de pierre ayant servi de tombeaux ont certainement circulé sur les eaux du Cher. Urçay n’est sur aucune route ancienne importante : la voie antique Bourges/Néris passe sur l’autre rive de la rivière. Il semblerait que le Cher, aujourd’hui impraticable pour la batellerie, ait favorisé la circulation des hommes et des biens dans ces périodes très anciennes. On ne peut que se réjouir des prospections subaquatiques qui auscultent ses eaux et qui pourraient, dans l’avenir, fournir de très intéressantes observations.
Note : l’image qui illustre ce billet est celle d’une monnaie identique à celle trouvée par les fouilleurs, proposée à la vente sur un site marchand.
© Olivier Trotignon 2020