Située à la lisière sud de la forêt de Tronçais, à quelques kilomètres de Cérilly (03), la forteresse de la Bruyère est un monument qui attire l'attention par sa singularité. Au sol, on note la présence de vestiges d'une enceinte fortifiée flanquée de tours et protégée par un large et profond fossé humide. Le terre-plein central ne semble pas avoir accueilli de construction maçonnée. Cet ensemble n'a aucune particularité architecturale qui mérite un détour à des fins touristiques, mais le médiéviste, historien ou archéologue, en repérera immédiatement l'intérêt en observant l'organisation générale du parcellaire voisin. Les haies et les chemins adoptent des formes concentriques jusqu'à plusieurs centaines de mètres des murailles de l'ancien château. Un détour par les sites internet de photographies aériennes verticales révèle un vaste terroir radioconcentrique encore bien perceptible dans un paysage bocager qui, fort heureusement, n'a pas été saccagé comme tant d'autres par le remembrement.
On est naturellement tenté de voir dans ce schéma une illustration grandeur nature du principe féodal de la gestion des espaces agricoles: au centre, le château, dans un premier périmètre, la réserve seigneuriale puis les tenures paysannes occupant un espace rayonnant et distribué par des chemins d'exploitation conduisant au réduit défensif. D'autres lieux restent aujourd'hui significativement marqués par cette géométrie: Issoudun, dans l'Indre, et Dun-sur-Auron, dans le Cher, en sont les meilleurs exemples.