Que la terre leur soit légère!

Publié le par Olivier Trotignon

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Les mots me manquent, ou peut-être, au contraire, se bousculent, pour exprimer tout ce que les événements de ces derniers jours m'inspirent.
Ma première pensée est pour chacune de ces vies perdues et risquées par des gens simples, surpris par la mort ou volontaires pour leur mission.
Ma deuxième révérence va aux dessinateurs de Charlie Hebdo, victimes de cette gangrène homicide non pas parce qu'ils représentaient l'Ordre républicain, comme les fonctionnaires de police, ou la religion juive, comme les victimes de la porte de Vincennes, mais la Culture.
Que la terre leur soit légère.
Je ne suis pas lecteur de Charlie. Je ne l'ai acheté, je crois, que par solidarité lors de la parution des caricatures du Prophète. En ce sens, je ne suis pas Charlie.
Je suis autre chose.
Juste un historien qui vit dans un monde que ces fanatiques, eunuques absolus de la pensée, détestent au point de détruire les bouddhas géants de Bâmiyân, les mausolées et la bibliothèque de Tombouctou, les sites archéologiques de Syrie.
Dans mon monde il y a beaucoup de musique, comme celle du chanteur Kabyle Lounès Matoub, égorgé parce que ses chansons parlaient d'amour et de liberté. Il y a le respect des femmes, des enfants, de l'instruction, tout ce qui est broyé au Nigéria ou en Afghanistan.
Je ne suis pas un soldat mais, comme des millions d'autres, gens de Lettres, musiciens, artistes, journalistes, essayistes, scientifiques, chercheurs, poètes, enseignants, je me bats quotidiennement pour que la Culture soit à la portée de tous, et que le plaisir de celui qui aura accès à mon travail soit le plus grand possible, peu importe sa foi ou son athéisme, la couleur de sa peau ou de ses yeux, son sexe et son âge.
La mort des journalistes de Charlie - je pense au grand Duduche, à l'adjudant Kronenbourg, aux merveilleux beaufs moustachus en tricot de corps qui sont comme d'anciens compagnons de route qui auraient perdu leur père - est une munition supplémentaire dans l'arsenal qui me donne la force de continuer mon chemin, et qui minimise un peu plus les petites médiocrités locales que j'ai eu à affronter ces dernières années.
Je ne suis pas Charlie. Je suis juste un peu Cabu, un peu afghan, un peu babylonien, un peu yasidi, un peu new-yorkais, un peu malien, un peu citoyen d'un monde dont l'avenir s'écrira avec les couleurs de la Liberté.
 

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© Olivier Trotignon 2015

Publié dans polémique

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