A première vue, l’église romane de Saint-Georges-de-Poisieux, dans le sud du Boischaut, est un monument qui se distingue peu des autres églises rurales de la région. Seule sa situation, sur une bosse un peu plus élevée que la moyenne du paysage de bocage qui l’entoure, la fait remarquer de loin. Son ornementation extérieure, très sobre, est beaucoup moins riche que celle du petit prieuré augustin de Soye, situé à quelques pas de là.
L’église de Saint-Georges n’aurait donc, à priori, rien à offrir de nature à mériter un détour pour qui n’est pas spécialiste de l’architecture religieuse si on se contentait d’en faire le tour. Franchi le seuil, le sanctuaire prends une tout autre importance. Une rare voûte en cul de four, d’un modèle certainement identique à celles autrefois décrites au prieuré d’Orsan, soutient le clocher. Une pierre d’autel sculptée avec un soin rare et d’un volume considérable, se remarque dès l’entrée de l’église, mais c’est surtout vers les ouvertures du chevet que se porte l’attention du médiéviste.
L’édifice conserve en effet quatre vitraux XIIIe d’une qualité identique à ceux des verrières de la cathédrale de Bourges, exceptionnels, sinon uniques dans la région. Peu affectés par les agents chimiques atmosphériques, dans une région où la pollution demeure peu sensible, les verres ont conservé une transparence qui n’est certes pas celle des vitraux modernes comme on en voit un peu partout, mais les détails restent plus lisibles qu’à Bourges avant les restaurations. Une scène représentant le patron de l’église, un saint Georges armé, et l’exact ajustement des encadrements aux ouvertures, prouvent leur authenticité et on est en droit de supposer que nous disposons là des derniers vestiges d’une composition plus vaste qui occupait tout l’espace des fenêtres du chevet.
La question que se pose l’historien face à ces objets exceptionnels est de savoir si cette exception est d’origine ou due aux misères des temps. Les vitraux de Saint-Georges-de-Poisieux sont-ils les uniques souvenirs d’une pratique universelle, qui pourrait nous laisse imaginer la majorité des églises médiévales éclairées par des scènes colorées, ou témoignent ils d’une commande particulière auprès d’un atelier de verriers. Seul l’avis d’un historien de l’Art pourrait, si j’ose dire, nous éclairer sur la question. Nous savons, grâce aux archives de l’abbaye de Noirlac notamment, que le bourg était le siège d’une seigneurie vassale de Charenton et que la route principale qui longeait la vallée du Cher passait par ce lieu. Les chevaliers qui tenaient la place avaient les moyens d’orner l’église de leur paroisse, mais ils n’étaient pas les seuls dans ce cas. Il est fort possible que beaucoup d’autres chapelles aient présenté les mêmes qualités artistiques mais que le temps, les dégradations, le vandalisme et la négligence des paroissiens aient fini par effacer ces traces du passés, ou que les vitraux d’origines, devenus opaques, aient été remplacés par des œuvres plus récentes laissant filtrer plus de lumière. Seule une lecture attentive des archives paroissiales modernes pourrait aider à nous faire une idée juste sur la question.
Il reste que la municipalité de Saint-Georges n’a pas les moyens matériels d’ouvrir en permanence le monument hors temps liturgique ordinaire. Je conseillerai donc aux amateurs de surveiller le programme des Journées du Patrimoine. A la demande de m. Fourre, maire du village et conseiller général du canton de Saulzais-le-Potier, que je tiens à remercier ici pour m’avoir facilité l’accès à l’intérieur de l’église, il est fort possible que j’intervienne sur place en fin d’été 2011, avant les Journées du Patrimoine, pour une brève présentation historique du terroir. L’accès à l’église sera, bien entendu, inscrit au programme de la manifestation.