/image%2F1492036%2F20241012%2Fob_26b6ab_2124756-n.jpg)
© N. Lesaffre
Les auditeurs qui m’ont fait le plaisir de venir écouter mon exposé, sur site, sur le château primitif de Montrond, lors des Journées du Patrimoine 2024, ont été les premiers à qui j’ai pu faire remarquer une curiosité toponymique: le nom même de « Mont-rond ».
Ce nom, qui forme presque à lui seul l’identité de la ville qui le porte « Saint-Amand-Montrond » n’a, en lui même, rien de remarquable. Formé de l’addition d’un radical et d’un suffixe, il nous est connu pour la première fois dans un acte acte de 1224-1225 citant la forteresse construite ou en cours de construction:
« forteritia Montis-rotundi ».
Un détail, toutefois, a retenu mon attention. Si on recense les noms de lieux en altitude dans le paysage local au XIIIe siècle (collines, élévations de terrain, bords supérieurs des vallées alluviales…), on constate que les Berrichons médiévaux emploient presque exclusivement le mot « Puy » (en latin podium) pour désigner ces formes de relief.
Depuis, ces toponymes ont disparu des cadastres (mine d’argent de Puy d’Habert, vers Bruère-Allichamps, léproserie de Puy-David, près de Châteauneuf…) ou ont dégénéré en Piot (le Piot-Gré = le Puy-au-Gré), en Pied (le Pied-de-Coust = le Puy de Coust) ou en Peu (le Peu-Feuilloux, en vallée du Cher).
Une exception notable, sur laquelle je n’ai pas eu le temps de travailler: Montluçon, également en vallée du Cher, contemporaine de Montrond.
On peut donc émettre l’hypothèse suivante. Renaud de Montfaucon, seigneur de Charenton et bâtisseur de Montrond, est un homme originaire de la Champagne berrichonne, proche de Bourges. Il est probable que sa langue maternelle soit le français parlé dans la zone d’influence des Capétiens. Il nomme son nouveau château « Montrond ». En ce début de XIIIe siècle, le sud de l’actuel département du Cher, où il exerce son nouveau rôle de seigneur de Charenton après son mariage avec l’héritière des premiers chevaliers de cette localité, parle très probablement une autre langue, proche des parlers du Sud. La disparition des toponymes anciens ou leur dégénérescence serait un signe d’un lent glissement linguistique dont le seigneur de Montrond est peut-être, intentionnellement ou non, un élément déclencheur.
/image%2F1492036%2F20241012%2Fob_58ce7f_capture-d-ecran-2024-10-12-a-10-38.png)
© Olivier Trotignon 2024