Au cœur d’une évolution du langage: le château de Montrond (Cher)

Publié le par Olivier Trotignon

© N. Lesaffre

Les auditeurs qui m’ont fait le plaisir de venir écouter mon exposé, sur site, sur le château primitif de Montrond, lors des Journées du Patrimoine 2024, ont été les premiers à qui j’ai pu faire remarquer une curiosité toponymique: le nom même de « Mont-rond ».

Ce nom, qui forme presque à lui seul l’identité de la ville qui le porte « Saint-Amand-Montrond » n’a, en lui même, rien de remarquable. Formé de l’addition d’un radical et d’un suffixe, il nous est connu pour la première fois dans un acte acte de 1224-1225 citant la forteresse construite ou en cours de construction:

« forteritia  Montis-rotundi ».

Un détail, toutefois, a retenu mon attention. Si on recense les noms de lieux en altitude dans le paysage local au XIIIe siècle (collines, élévations de terrain, bords supérieurs des vallées alluviales…), on constate que les Berrichons médiévaux emploient presque exclusivement le mot « Puy » (en latin podium) pour désigner ces formes de relief.

Depuis, ces toponymes ont disparu des cadastres (mine d’argent de Puy d’Habert, vers Bruère-Allichamps, léproserie de Puy-David, près de Châteauneuf…) ou ont dégénéré en Piot (le Piot-Gré = le Puy-au-Gré), en Pied (le Pied-de-Coust = le Puy de Coust) ou en Peu (le Peu-Feuilloux, en vallée du Cher).

Une exception notable, sur laquelle je n’ai pas eu le temps de travailler: Montluçon, également en vallée du Cher,  connu dans les textes à partir du milieu du XIX siècle.

Les deux cas présentent une forte identité topographique. Bien que le paysage urbain montluçonnais rendent la perspective sur l'emplacement du château assez confuse, on remarque que la colline sur laquelle celui-ci s'élève est bien détachée des autres reliefs qui bordent la vallée du Cher. De ce point de vue, les sites fortifiés de Montluçon et de Montrond sont comparables, et uniques en leur genre dans cette section de la vallée. Le radical "mont" n'était donc pas synonyme de "puy", à la fois appartenant à un lexique méridional et désignant un élément topographique différent.

© Olivier Trotignon 2024

Publié dans histoire locale

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M
Merci pour ce nouvel article qui donne un éclairage sur la fonction politique des noms . A titre d'exemple des noms anciens je peux ajouter des lieus qui me sont familiers "Pied de Nid "entre St Bonnet et Tronçais et le "Peu du Boueix " sur la commune de Préveranges
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O
Merci pour ce commentaire! Bien à vous, O. Trotignon